Quel rôle pour les enseignants ? Combien de temps dureront encore les tableaux noirs ? Le numérique va-t-il remplacer le livre scolaire ? Les élèves resteront-ils chez eux ? Notes, contrôles, diplômes ? Imaginons à quoi ressemblera l’école de 2030.

Le sommet mondial sur l’innovation dans l’éducation Wise

C’est le nom du sommet mondial sur l’innovation dans l’éducation qui a rassemblé 645 experts en juin 2014 sur la question de l’avenir de l’enseignement. De ce sommet sont sorties différentes hypothèses. Le développement du numérique semble évident pour tous, mais les questions de l’évaluation ou du rôle de l’enseignant amènent quelques divisions.

Pour la plupart des experts rassemblés en juin dernier, il sera mis en place au cours des prochaines années des méthodes innovantes et plus créatives pour les élèves. Pour 93% des enseignants et chercheurs réunis, les programmes scolaires transformeront le rôle de l’enseignant et redéfiniront de nouvelles règles dans l’apprentissage.

On voit l’école du futur comme un environnement interactif où toutes les innovations technologiques auront un rôle essentiel pour le bien des enseignants comme des apprenants.

« Facilitateur d’apprentissage »

Pour 75% des experts de Wise, les valeurs les plus importantes en 2030 seront les compétences personnelles et interpersonnelles, pour 83% le contenu des cours sera plus individualisé, reflétant les besoins de chaque élève.

L’enseignant, lui, devra quitter son rôle de « maître de conférence » pour se rapprocher du « facilitateur d’apprentissage ». La présence physique et l’interaction humaine restent pour tous des facteurs indispensables à l’apprentissage. Pas question donc de ne plus aller à l’école le matin sous prétexte que tous les cours sont téléchargeables.

Aux Etats-Unis et notamment en Floride, près de Miami, certains lycées ont déjà testé des classes sans professeur où tout le cours est enregistré sur ordinateur. Les élèves, parfois jusqu’à 40 par classe, font dérouler le cours sur leur écran et peuvent poser des questions à un enseignant par vidéoconférence.

Certains élèves savourent le principe car ils peuvent suivre le cours à leur rythme et se sentent « eux-mêmes enseignants ». D’autres élèves, en revanche, assurent qu’ils préféraient la présence d’un professeur et regrettent de se retrouver en face d’un ordinateur.

Ce principe d’éducation en ligne se développe rapidement mais connaît déjà ses premières dérives : pour certains enseignants ayant eu à gérer cette situation et dû répondre aux questions de trois classes en même temps, « les élèves étaient majoritairement perdus et ne pouvaient pas suivre le programme à la vitesse nécessaire ».

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Le mobilier des salles change lui aussi, pour proposer davantage de mobilité
et de confort aux élèves.

La notation

L’évaluation des élèves, elle, fait encore et toujours débat. 39% des chercheurs réunis par Wise assurent que les diplômes continueront d’être la méthode la plus efficace, contre 37% qui jugent qu’une certification professionnelle appréciant les capacités de gestion, de collaboration verra le jour.

Et pourtant, seulement 29% des intervenants pensent que les écoles traditionnelles resteront la principale source de connaissances contre 43% de convaincus que le contenu éducatif sera principalement issu de ressources en ligne.

En Belgique, dans la ville de Buzet, un petit établissement expérimente l’école sans évaluation, sans punition et sans notation. Les enfants disent eux-mêmes aux professeurs leurs difficultés et ne sont jamais jugés ou évalués. Lors d’une correction, le professeur souligne les bonnes réponses au lieu de noter les erreurs.

Une idée qui commence à faire son chemin mais qui laisse quelques spécialistes dubitatifs. Pour certains responsables d’écoles, la note est le seul moyen pour les élèves comme pour les parents d’élèves de réaliser l’avancée scolaire d’un enfant et, ainsi, de pouvoir réagir à temps en cas de difficultés.

Travaux collectifs

En janvier 2014, Emmanuel Davidenkoff, spécialiste de l’éducation et directeur de la rédaction de l’Étudiant déclarait : « L’école du futur passera par la pédagogie coopérative (…) Combien de temps faudra-t-il à l’enseignement scolaire, et singulièrement au secondaire, pour le comprendre et pour cesser de n’évaluer que les compétences individuelles ? Pour qu’il apprenne à valoriser les capacités à coopérer, à formuler et à résoudre collectivement des problèmes de tous ordres ? ».

Ils sont nombreux les analystes et enseignants convaincus que l’école du futur sera davantage orientée vers des travaux collectifs. Les problèmes de mathématiques se résoudront entre amis, chacun gèrera sa partie de la chronologie de l’histoire de France et apportera sa plante à l’herbier du cours de Sciences de la vie et de la terre.

Cette nouvelle pédagogie est déjà développée dans les premières installations numériques proposées à l’école. Les MOOC (Massive Online Open Course) par exemple se définissent par leur concepteur (Dave Cormier) comme « ouverts aux commentaires, participatifs, où l’on échange et partage des idées, des réflexions… (…) Ils impliquent d’être connecté, de coopérer et d’être engagé dans un processus d’apprentissage ».

La fin du livre classique ?

Chez Microsoft, et notamment au siège français d’Issy-les-Moulineaux, on tente d’imaginer l’école du futur. Le géant de l’informatique a créé des salles de classe dans lesquelles les enseignants peuvent venir se former à différents nouveaux outils numériques.

Les ingénieurs de Microsoft ont également intégré des programmes entiers de l’Éducation nationale, réalisés par des éditeurs spécialisés, afin de les proposer sur des tablettes et de laisser au rang du mauvais souvenir le cartable de 12 kilos que les élèves de collège subissent parfois.

Fini le surpoids (non réglementaire) du sac de cours contenant à la fois les livres d’histoire-géographie, de mathématiques, de français, de langues, de sciences, les cahiers et la trousse… Dans le monde de 2030, selon Microsoft, il suffira juste d’avoir une bonne mémoire à la fois sur sa tablette, et toujours, dans sa tête…

« Le numérique au service du pédagogique et pas l’inverse »

En juillet 2013, la loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche annonçait l’arrivée du numérique comme « le levier de la réussite et de l’insertion des étudiants ».

L’Université de Strasbourg développe de nombreux programmes dans ce sens. On y a imaginé par exemple le principe de boitiers de votes permettant aux élèves de donner une réponse sans être jugés par les autres élèves.

Cette idée développe le principe d’interactivité entre professeurs et élèves tout en « dédramatisant l’erreur » selon Nicole Reget-Collet qui dirige l’Institut de développement et d’innovation pédagogique (Idip). Pour cette spécialiste de l’avancée technologique, « l’important est de savoir ce que l’on fait des technologies, de clarifier en amont ce que l’on cherche à générer et susciter chez les étudiants ».

À la Direction des usages du numérique (DUN), tout est fait pour que les enseignants puissent adapter leurs idées pédagogiques aux nouveautés du monde numérique. On y forme les professeurs à développer leurs cours de façon à les rendre plus vivants et plus interactifs.

« Entre le prof qui souhaite simplement passer du PDF au Power Point et celui qui va vouloir produire un Mooc, nous sommes là pour aider les enseignants à mieux médiatiser leurs cours. La règle générale est toujours la même : le numérique doit servir au pédagogique et pas l’inverse » explique le directeur adjoint du Dun, David Gauckler.


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